Selon une récente étude réalisée par l’agence de notation financière PBR (Pronoia By Reckon) Rating, le secteur privé écoule 75% des ventes de médicament en Tunisie. Il joue le rôle principal dans la distribution de médicaments à travers les 1.500 officines pharmaceutiques réparties sur le territoire, qui se fournissent auprès d’une soixantaine de grossistes répartiteurs. En ce qui concerne la production de médicaments, son rôle s’est développé depuis les années 1990, période durant laquelle l’Etat a encouragé l’émergence d’une industrie pharmaceutique locale via un cadre fiscal, commercial et réglementaire favorable.
Un secteur relativement atomisé, mais riche en matière d’investissements
Actuellement, l’industrie pharmaceutique tunisienne compte 35 unités de fabrication de médicaments à usage humain. C’est un secteur relativement atomisé, où coexistent filiales de grands laboratoires étrangers (Sanofi, Pfizer, GSK, Novatris…) et producteurs 100% tunisiens (Adwiya, Medis, Opalia, Unimed, Teriak…). L’industrie locale couvre désormais plus de la moitié des besoins en médicaments du pays, avec un taux de couverture de 52,5% en 2017 (soit 1.2 milliard de dinars). Ce taux a vocation à s’accroître, dans la continuité des cinq dernières années, avec un décalage de croissance entre importations (+ 2,5% par an) et production locale (+7% par an).
Avec 720 millions de dinars (MDT) injectés en 2018, le secteur pharmaceutique tunisien reste dynamique en matière d’investissements. C’est, également, une industrie dont l’orientation à l’export évolue progressivement, avec 17% des ventes en 2018, (soit 164 MDT). Des exportations en hausse significative (+18% par an depuis 2012) essentiellement orientées vers les pays du Maghreb.
« L’industrie pharmaceutique locale privée affiche de belles réussites parmi ses acteurs et son poids est désormais devenu majoritaire sur le marché local du médicament… Concomitamment, le secteur public se trouve dans une situation difficile subissant un contexte macroéconomique délicat et un retard indiscutable en matière de réformes…Une séquence difficile, mais sans doute propice à l’établissement d’un dialogue constructif entre le privé et le public dans un objectif d’améliorer et privilégier davantage l’offre locale de médicaments…», indique l’étude.
Une petite industrie, de grandes ambitions
L’industrie pharmaceutique privée affiche des ambitions en matière d’investissements, d’amélioration de la couverture des besoins du marché national et de compétitivité à l’export.
Le secteur, qui emploie 9.000 personnes, compte créer 2.500 nouveaux postes d’emplois d’ici 2023. S’agissant de l’investissement dans les capacités de production, ils seront de l’ordre de 900 MDT à l’horizon 2023 contre 720 MDT en 2017, avec la mise en place de cinq nouvelles unités de production. Il est, également, prévu de mettre en place un outil développé qui permet de relever davantage le défi de l’exportation qui devrait passer de 164 MDT en 2018 à 520 MDT en 2023 puisque le développement des exportations peut permettre une consolidation rapide du secteur et des gains importants pour la balance commerciale en Tunisie. Il existe, également, des capacités de production additionnelles qui permettront d’améliorer le taux de couverture du médicament par la production locale pour passer de 52,5% en 2017 à 62% en 2023.
L’étude ajoute que le contexte tunisien est porteur d’un ensemble de vecteurs favorables au développement de l’activité de Recherche & Développement, dans le milieu de la santé et particulièrement dans l’industrie du médicament. Avec le développement des infrastructures et un cadre juridique adapté, la Tunisie peut se positionner comme un Hub R&D, notamment pour les études cliniques, permettant ainsi de consolider la valeur ajoutée du secteur et de renforcer son impact positif sur la balance commerciale du pays.
« Le secteur du médicament est performant, mais il nécessite un secteur privé dynamique évoluant dans un cadre juridique adapté pour accompagner ses ambitions. Il nécessite également un secteur public fort qui dispose de tous les moyens nécessaires (organisationnels et financiers)… Face au dynamisme affiché du secteur privé, le domaine public se doit de retrouver sa vigueur afin de remplir pleinement ses rôles essentiels de régulation, de contrôle et de centrale d’importation », précise l’étude avant d’ajouter que le secteur local du médicament pourrait, à moyen terme, devenir un important contributeur à l’amélioration de la balance commerciale de la Tunisie.
Pour résumer, PBR Rating indique que le secteur privé est désormais le poids lourd de la filière du médicament en Tunisie. Les ¾ des médicaments sont écoulés à travers le circuit de distribution privé et la production nationale de médicament couvre 52.5% des besoins en médicaments du pays. Mais pour réaliser toutes ces ambitions, l’établissement d’un dialogue et d’une entente entre le public et le privé est un prérequis. Ce dialogue s’est amorcé et devrait aboutir à des évolutions positives du cadre réglementaire et de certains dysfonctionnements identifiés.